Réponse ouverte à David Elkaïm

Vincent Poymiro - David Elkaïm © Ainsi soient-ils

De gauche à droite : Pierre Langlais, journaliste séries TV de Télérama, David Elkaïm et David Elkaïm, dans les jardins de l’évêché de La Rochelle, nous précise sur Twitter le réalisateur Rodolphe Tissot, auteur de cette photo (14 septembre 2015).

 

Fin août, David Elkaïm, co-scénariste d’Ainsi soient-ils, postait un commentaire sur notre site. Nous lui avons répondu par e-mail. Sans nouvelles de lui à ce jour, nous publions ici notre réponse.


 

Cher Monsieur,

Au nom de toute l’équipe, je tiens d’abord à vous remercier pour votre message posté sur notre site la semaine dernière, qui vous honore autant qu’il nous honore, surtout au moment même où votre réalisateur, Rodolphe Tissot, vient de nous bloquer sur Twitter, pour une raison que malheureusement nous ignorons.

Nous comprenons votre agacement quant à certaines imprécisions dans les articles publiés sur notre site Ainsisoientils.com. En particulier, par rapport à celui que vous mentionnez sur la genèse de la série. Nous pensons cependant que l’essentiel n’est pas tant le nom des personnes en responsabilité dans cette affaire que les décisions elles-mêmes, prises avec un manque de réalisme de la part des différentes parties prenantes, comme malheureusement trop souvent dans les séries françaises.

Quoiqu’il en soit, nous serions vraiment très heureux de connaître les autres à « peu près, erreurs, absurdités » que contiennent notre site au sujet de la série (et de préférence, d’ailleurs, surtout les absurdités. 🙂 Cela nous permettrait de rectifier le tir, quand cela est possible. Il faudrait d’ailleurs pouvoir aussi rectifier les erreurs de la série émises à l’encontre de l’Eglise… mais le mal est fait (encore qu’il reste une saison, dont nous espérons qu’elle sera meilleure sur ce point que les précédentes ;-). Peut-être pourriez-vous, cher Monsieur, nous rassurer sur ce point ?

Nous voudrions aussi vous poser cette question : dans 10 ans, que restera-t-il d’Ainsi soient-ils ? Une fresque peu reluisante des catholiques – pourtant en plein renouveau ? Une série de clichés sur les séminaires ? La réponse ouverte et positive des catholiques sur Internet ? Ou encore, aucune de ces visions diamétralement opposées ne sachant communiquer entre elles ?

Nous avons eu un rêve : et si, au contraire, nous pouvions montrer aux internautes que nous avons su nous parler, nous réunir, plutôt que de demeurer dans cette confrontation stérile, mail contre mail, site contre site, écran contre écran ?

Ce pourquoi, nous souhaitons de tout coeur que les conditions d’un dialogue serein et courtois entre nous soient enfin établies. Votre message est donc pour nous une chance et nous tentons de la saisir du mieux que nous pouvons. Quitte à être un peu longs !…

Pour mémoire, ce dialogue entre vous et nous, nous l’avons cherché dès le début de votre série, par différents moyens. D’abord, en 2012, un membre de notre équipe a eu l’idée d’organiser un débat avec vous aux Bernardins (magnifique lieu culturel parisien que vous connaissez peut-être ?). Nous aurions invité le réalisateur, les scénaristes (donc vous-même, cela va de soi), vos conseillers, mais aussi, des directeurs de séminaire et des séminaristes que nous connaissons, sans oublier les journalistes des médias chrétiens, que nous avions sondés et qui étaient partants.

Cette proposition avait alors été faite de vive voix au téléphone au responsable du pôle web d’Arte, David Carzon. Et Direct matin avait bien voulu s’en faire l’écho, dans un article du 23 octobre 2012. Nous l’avons relancé, plus tard, sur Tweeter. Malheureusement, il n’y a eu à ce jour aucune suite donnée à cette proposition. Pourquoi ? Cela restera-t-il lettre morte à l’aube de la saison 3 ?

Toujours en 2012, nous avions alors poursuivi notre main tendue par une prise de contact avec Zadig production et avec chacun des principaux acteurs. Comme vous le savez peut-être, l’un d’eux a bien voulu nous répondre : nous lui avons alors proposé un « stage » en immersion dans un séminaire français, pour qu’il puisse se rendre compte par lui-même de la réalité d’un séminaire. Il nous a fait le bonheur d’accepter. C’était un beau début de dialogue et de partage mutuel sur les points qui nous rassemblent : le goût du travail bien fait (son métier d’acteur, notre métier à nous), etc. Il aurait fallu élargir cette expérience au reste de votre équipe. Pourquoi ne sommes-nous pas arrivés, ensemble, à nous parler ?

Cela aurait permis d’éviter quelques malentendus que votre message laisse entrevoir, comme lorsque que vous suggérez que nous estimons « malveillante » la vision que vous portez sur les hommes d’Eglise. En effet, nous comprenons bien que vous avez voulu bâtir une fiction. Mais mettez-nous à notre place, un instant : imaginez que vous apparteniez à une famille célèbre, qui a traversé les âges, dont tous les membres ne sont bien sûr pas tous des saints, mais que vous aimez malgré tout. Et voici que vous découvrez un jour à la télévision, une fiction qui ne laisse entrevoir que les aspects négatifs de votre famille, avec un angle d’attaque parfaitement horizontal ? Que votre propre père est dépeint comme « sénile » ? Sans parler, bien sûr, des moqueries contre votre mère… dont les affiches maculées de sang s’étalent jusqu’au chemin que vous empruntez pour aller travailler le matin ?

Nous comprenons bien, comme vous nous l’expliquez dans votre message, que « la série, dont le sujet est religieux, traite essentiellement des hommes et des liens entre ses hommes, mais aussi de l’engagement, quel qu’il soit. » Seulement, pour se faire, pourquoi avez-vous choisi un séminaire, plutôt qu’une école de pilotes de chasse, d’apprentis cinéastes ou d’architectes ? Ne vous seriez-vous pas tout simplement trompé de sujet et donc, de décor ?

Pourquoi, aussi, avoir pris les conseils d’un jeune prêtre « défroqué » dont les choix de vie vont à l’encontre de ce qui est proposé dans l’institution d’où il vient, où il a été formé ? (Propos tenus par Rodolphe Tissot dans Télérama en octobre 2012 et démentis par votre collègue scénariste, Vincent Poymiro, dans Dimensions séries en octobre 2014). Quid encore de ce site de séminaire volontairement créée dans un style « old school années 90 » pour, encore, se moquer des catholiques, comme par exemple de leurs prières ? De ces scènes de sexe au séminaire entre séminaristes, de l’adoration eucharistique comme pratique d’un autre âge, de l’Immaculée conception tournée en dérision, des blagues sur Saint Sébastien, du portrait noir de l’archevêque de Paris et de ses confrères prêtres ou évêques ?

Bref… non, cher Monsieur, les scénaristes français ne pourront pas se moquer éternellement de l’Eglise catholique sous prétexte de fiction. Comme avec Inquisitio (dont le réalisateur avait eu l’honnêteté et le courage de s’excuser sur les ondes de Radio Notre Dame), le Da Vinci Code ou encore, plus loin de nous, Amen, de Costa-Gavras, pour ne prendre que ces malheureux exemples, nous serons là. Pour rendre compte de l’espérance qui est en nous, avec, si possible, douceur et respect.

Et  désormais, à chaque fois que cela s’avèrera nécessaire, il y aura toujours, quelque part, des catholiques qui se lèveront spontanément pour constituer une « minorité créative » et se servir de ce merveilleux outil qu’est Internet pour apporter un éclairage plus en phase avec la réalité. Nous serons certes des petites lumières dans la nuit médiatique, mais plus la pièce est sombre, plus la bougie se voit, n’est-ce pas ?

En conclusion, vous nous dites « je vois que vous ne lâchez rien » : sachez aussi que pour vous comme pour nous, dans son grand amour plein de miséricorde, Jésus n’a rien lâché. Il a déjà donné sa vie pour vous, pour nous, tous ensemble, alors nous non plus, nous ne lâcherons rien !

Sans rancune aucune, et dans l’espoir, toujours, de pouvoir vous rencontrer en vrai, même autour d’un simple café,

« Sébastien, séminariste »
pour toute l’équipe d’Ainsi soient-ils (mais .com)

 

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